La cabane de la clairière
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il y a deux sortes...

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Message par pehache 19.09.24 21:01

Il y a deux sortes de textes : ceux que j’aimerais écrire et ceux que je n’écrirai pas. Souvent, ce sont les mêmes.

Il y a deux sortes de textes, ceux qui sont assez longs pour qu’on puisse se torcher avec. Et les autres.

Il y a deux sortes de textes ceux, que j’aurais aimé écrire et ceux que j’écris.

Il y a deux sortes de textes, ceux qui parlent et ceux qui font du bruit.

Il n’y a qu’une sorte de texte. Les autres n’en sont pas.

Il y a deux sortes de textes, ceux qui nous habitent et qu’on plagie ou rumine encore et encore, et les autres, qu’on regrette même d’avoir lus. 

l y a deux sortes de textes, ceux qu’on montre et ceux qu’on n’ose pas montrer. Et parfois on a tort. Mais pas toujours.

 Il y a deux sortes de textes, ceux qui nous aident à grandir et ceux qui nous amenuisent.

 Il y a deux sortes de textes, ceux qui chantent et ceux qui pleurent. Il arrive que ce soient les mêmes.

 Il y a deux sortes de textes : ceux qu’on donne et ceux qu’on jette. 

pehache

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Message par Lix 20.09.24 11:19

C'est à se faire des nœuds au cerveau :-)
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Message par Lix 20.09.24 15:09

Du coup j'ai relu une paire de fois, vous m'avez sapé l'envie d'écrire :-)
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Message par pehache 20.09.24 23:44

N'hésitez pas à en proposer d'autres.
Plus roses, si vous préférez.
L'idée de départ, un ami berger dans le Mercantour, philosophe à ses heures, qui, pince-sans-rire, m'avait dit: "il y a deux sortes d'hommes, ceux qui un couteau bien aiguisé- et les autres".

pehache

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Message par Lix 21.09.24 10:14

je ne sais pas comment je dois comprendre le fait que vous ayez mis un j'aime sur mon commentaire, qu'est ce que je deviens soupe au lait ! :-)
plus roses ? vous m'avez fait rire.
effectivement, mieux vaut être équipé quand on est dans les montagnes, votre ami a-t-il déjà vu des loups ? j'adore les couteaux pliants, j'en ai toute une collec'
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Message par Lix 21.09.24 15:45

allez, puisque c'est proposé :

Il y a deux sortes de textes….
Ceux que l’on pense et ceux que l’on écrit effectivement
Les uns écrits à la main, les autres saisis informatiquement
Ceux des autres et les miens
Ceux qui ont brûlé et d’autres non
Ceux dont on corne les pages et ceux que l’on ouvre et lit avec délicatesse
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Message par Phil BOTTLE 28.10.24 8:43

Prétextes

Il y a autant de textes, que de prétextes
Autant de faces, que de préfaces
De préfaces autant que postfaces.
Mais entre préfaces et postfaces
Autant de textes qui ne s'effacent.
Cet écrit est-il un prétexte 
Pour dire aux mots que je les aime ?
Dites-moi, en pensez-vous de même ?
Et sinon, qu'en pensez-vous vous-même.

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Message par Ray dit Kourgarou 28.10.24 13:06

pehache ? P.H. ? a écrit:L'idée de départ, un ami berger dans le Mercantour, philosophe à ses heures, qui, pince-sans-rire, m'avait dit: "il y a deux sortes d'hommes, ceux qui un couteau bien aiguisé- et les autres".
Tiens tiens, une histoire de Mercantour et de berger pince sans rire avec lequel on discute à ses heures au moment de la pause après une longue marche cela me rappelle quelqu'un qui possédait un autre pseudo sur un autre site bien connu et que certains ici fréquentaient régulièrement ! Est-ce que je me trompe ? Coïncidence surprenante ? 🤔
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Message par pehache 09.11.24 12:18

Le soleil au zénith écrase la rue de terre battue de ses rayons. Je marche ; marcher se dit descendre. Descendre tout droit, sans halte possible, entre les murs blancs des maisons passés à la chaux et l'ocre muraille lépreuse de quelques édifices à l'abandon. Blancs sont les murs, oui, en dépit de la poussière, à cette heure où, manichéen, le soleil efface les nuances.
La poussière, ocre rouge orangé, la poussière, soulevée, provoquée par mes pieds, se libère du sol, voltige autour de moi, s'accroche à mes jambes, adhère à mes sandales, à mes pieds, asséchant ma sueur figée en un masque boueux.
Et toujours je descends. Sous le soleil immobile, je suis Achille, ou Thésée perdu au fond d'un implacable et rectiligne labyrinthe.
Rien n'accroche à la mémoire, les murs blancs de chaux et de soleil succèdent aux murs blancs de chaux et de soleil ; la muraille, parfois, il est vrai, les remplace, muraille de pisé ajourée d'où s'échappent d'incertains piaillements de bêtes, de vagues battements d'ailes, sans doute, puisque, de temps à autre, de loin en loin, une hirondelle s'émancipe et, flèche furtive jaillie d'un invisible carquois, s'en va narguer l'impassible et hiératique monarque.
Et je descends toujours. Mes pensées, accablées elles aussi par la touffeur, étranglées, le souffle court, se contentent du ressassement stupide de quelques évidences dont la silencieuse énonciation sert de soutien, de branlante cadence à ma marche -ma descente.
Serait-ce donc l'enfer? Là-bas. Au fond. Ou ici même?
Marcher, sans répit, sans espoir, se confiner dans l'ennui désolant, s'y dessécher, assister, simple témoin de son propre naufrage, à l'irrésistible déshydratation de l’esprit plus encore que du corps, et garder, ombre fugace, fantôme qui jamais ne renonce, cette lueur chétive, cette veilleuse, cette bougie qui vacille, mais aimerait s'éteindre et s'annuler. . .
Achille ? Ne suis-je pas Orphée au royaume des morts? Et le soleil, le symbole de ce renoncement à la plénitude de la chair, à l'exubérance de la vie et des couleurs?
Et je descends toujours. Orphée sans Eurydice. Voyageur sans bagage, sans but ni origine.
Me retourner? Pourquoi? Que verrais-je d'autre que ce que j'ai déjà vu ; sous la perspective inversée, la même rue, les mêmes murs, les mêmes indicibles murmures. M'en retourner? Vers quoi? Quand on ne sait plus d'où on vient, il semble dérisoire de souhaiter y revenir. Alors je vais, boussole cassée, nuque bloquée, je vais.
Pas le moindre souffle de vent, le plus petit frémissement. Stagne au sol la poussière que, seuls, mes pas soulèvent. Pas un bruit, à part ces rares frémissement qu'engendrent la muraille. Silence que j’ignorais et que soudain je sais, je sens. Depuis toujours. Pas de bruit, pas de vent, je descends.
Là, sur ma droite, protubérance grise, longiligne, sur le blanc d'un mur, serait-ce un homme? Ou un arbuste? Mort ou vivant? Un homme, nos regards se croisent sans se voir, il demeure immobile, je m'en vais. Crier? Mais j'ai la gorge sèche, les lèvres brûlées, j'essaie pourtant: un lamentable glapissement meurt sans saigner sur ma langue lézardée. Je pourrais… je pourrais me retourner, mais à quoi bon? et puis… ne l'ai-je pas rêvé?
Les maisons! Oubli-rappel-savoir-anamnèse. . . les maisons n'ont ni porte ni fenêtre. En fait, rien ne peut assurer qu'il s'agisse bien de maisons. Des façades, oui, qui, cependant, se donnent à voir comme des maisons.
De l'autre côté, d'autres Thésée de pacotille errent-ils, si tant que le verbe errer corresponde à cet inlassable mouvement vers le bas, à cette déchéance? Monter, descendre, le Bien, le Mal... Mais les hirondelles? Qu'ont elles à faire avec Platon, avec le Christ? Et l'homme, l'arbre, entrevus? Cette rupture dans l'insignifiant, pourquoi?
Un guetteur... on m'attend... le suspense du guet-apens... la peur... Oui, cette pensée m'habite, non comme une terreur mais un espoir. Qu'elle s'élève au bout d'un bras vengeur ou justicier et qu'elle s'enfonce, la lame, au plus profond de mon cœur! Fer libérateur, salvateur. La fin, le piège justifieraient cette démarche de bête allant à l'abattoir. L'homme, ou l'arbre, là-haut, n'en est-il pas l'indice annonciateur? On m'attend. Par cela j'existe et je prends sens. Je suis celui qui va. Vers la lame. Vers la mort. Celui dont le cœur poignardé ou la gorge tranchée prend rôle dans un récit, une histoire. Quand bien même on ne verrait là que figuration modeste, qu'importe, l'incident s'inscrirait dans une trame. Etre celui que justifie sa fin. Qui, par elle, échappe à l'insensé.
J'imagine. J'imagine encore. Je ne suis pas mort.
Même, même si la toile par l'araignée ourdie ne me vise pas moi, si je m'y perds innocemment, tout est beau en ce rêve. Me perdre, enfin, m'oublier, me diluer sous la morsure. La douleur serait elle-même une justification. Un martyre virginal, exempt de la moindre justification. La mort de l'homme. Gratuite. Mais l'homme c'est moi, et il se sauve, encore une fois, une dernière fois, il échappe. A tout, il s'abandonne.
Féminine ambition? J'assume. J'assume tout. Et le contraire. Et je la vois, fulgurante, et bleue, et belle, la lame déjà sanglante qui s'acharne.
Expiatoire victime de crimes inavoués ou inexistants. Mais possibles. Imaginés. Miens.
Et je marche, descends la rue bordée d'ocre et de blanc. Et si! Si tout était fini, déjà dit, déjà joué? Si je descendais de la croix, du Golgotha, si tout s'était déjà passé avant et qu'une chape d'oubli avait enseveli ce trop glorieux passé?
Et je marche-descends la lumineuse allée.
Tout est pareil au tout premier instant. La même perspective, les mêmes murs trop blancs, le même soleil stoppé, les mêmes illusions, confusions, espoirs, remarques, noyés dans des changements infimes, minuscules variations. Une hirondelle qui fuse et disparaît...
L'homme pourtant n'est apparu qu'une fois. Unique fait marquant l'avant, l'après.
C'est un rêve, à l'évidence je dors. Ces lieux, que j'invente, prennent source flagrante en ma mémoire. Le Maroc. Cette ville reconstituée. Ces bleds anonymes et déserts traversés par hasard. Sans doute, là, tout prés, à l'abri des murs épais-de l'autre côté de ces murs blancs épais – d'anciennes connaissances sont-elles en train de faire tourner un joint, une sebsi, et de servir le thé. Probablement, suis-je là avec elles. Et je fume. Et je rêve. Et je bois. A cette rue, cette descente, ce soleil, cette absence.
C'est un rêve, un songe haschischin. Sans doute, oui, l'ai-je déjà fait, ce voyage. Il y a longtemps. Jadis. Et aujourd'hui, calé dans ma trentaine, couché sur mon lit de lattes, suis-je en en train de le revivre.
Ou demain. Voilà l'explication: je vis un rêve de demain. Quand bien vieux, trop vieux, assagi, fatigué, je renoncerai. Ma vie effacée, je plongerai vers cette fin magnifiée tandis que prés de moi, gêné par l'attirail médical, le goutte-à-goutte, la machinerie de survie, quelque ami, quelque amour se penchera pour comprendre le sens de ce sourire béat, idiot, mystique, qui me magnifiera.
Je marche. Marcher se dit descendre. Descendre sans fatigue, sous le soleil trop vif.

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Message par pehache 09.11.24 12:19


Tiens tiens, une histoire de Mercantour et de berger pince sans rire avec lequel on discute à ses heures au moment de la pause après une longue marche cela me rappelle quelqu'un qui possédait un autre pseudo sur un autre site bien connu et que certains ici fréquentaient régulièrement ! Est-ce que je me trompe ? Coïncidence surprenante ? 🤔[/quote]
Sait-on jamais ?

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Message par pehache 09.11.24 12:23


1


C’est une avenue déserte bordée d’immeubles cossus.
Tout est pâle, monochrome, à la limite de l’être et de la transparence. Les semelles, pourtant, sur le bitume, mates et feutrées, résonnent.
L’homme, on le voit de dos, marche d’un pas égal.
Vous savez ce qui l’attend. Quelque chose de terrible, d’inéluctable, d’inexpugnable aussi. L’annonce du décès de ses enfants. Le viol et la mort de sa femme. Sa propre fin, peut-être.
Y échapper est illusoire. Il marche. Ses pas sont l’horloge de son destin. Il sait. Il sait déjà. Il pressent. Il va vers le dénouement. Peut-être même l’attend-il comme une délivrance, pour en finir, enfin, avec ce poids, ces jambes en coton, cette oppression dans la poitrine, cette gorge sèche, ce siphonnant vide en dedans, l’âcre saveur de tout néant.
Oui. En finir. Que des cris, des larmes déchirent le carton-pâte, qu’il sente, sous ses pieds raffermis par la douleur et l’incompréhension, que le monde est là, résistant, horriblement vivant.
Peu à peu, il s’éloigne. Son habit gris se fond dans le gris de l’avenue. Mais le bruit de son pas ne décroît qu’à peine. Et vous savez, oui, vous savez maintenant que la réalité lui appartient- à lui.
Alors, vous regardez autour de vous, ces bleus, ces verts, cette exubérance tapageuse de couleurs, ces gens qui vont et viennent, qui vous dévisagent ou vous ignorent. Tout cela vous paraît désormais si fragile et si faux.
Une cloche sonne. Vous pensez à l’enfant que vous avez été. À ses rêves d’azur, d’absolu. Tandis que des billes dans un sac tintent, sous l’œil d’un nounours au poil râpé, un goût de bile vous submerge. Dans l’air, flotte un parfum, celui-là même d’un être cher, père ? mère ? grand-mère ? Vous pleurez.
Le jour est tombé. Les lumières sont éteintes. Tout est gris désormais, pâle, monochrome, à la lisière du vrai. Vous marchez. Qu’importe que cela dure ou non. Vous savez que toute forme d’espoir relève de l’ignominie et de la trahison.




"J'aimerais terminer sur un message d'espoir. Je n'en ai pas. En échange,
est-ce que deux messages de désespoir vous iraient ?" - Woody Allen















2


Bien sûr, il s’agit toujours du même rêve. Il le sait. Les avenues haussmanniennes ont cédé la place au bord de mer. Les palmiers feignent d’agiter mollement une palme indolente, la mer est pâle, le ciel lourd de nuages bas. Et l’histoire est la même…
Alors, vous regardez autour de vous, ces bleus, ces verts, cette exubérance tapageuse de couleurs, ce temps comme fané, ralenti…
Une cloche sonne. Vous pensez à l’enfant que vous avez été. À ses rêves d’azur, d’absolu. Tandis que loin, très loin, tintent des billes dans un sac, sous l’œil d’un renard au poil râpé, un goût de bile vous submerge. Dans l’air, entremêlé à l’arome entêtant du tiaré, flotte un parfum, celui-là même d’un être cher. Vous pleurez.
Le jour est tombé. Tout est nuit désormais, monochrome, tout semble avoir basculé... Vous marchez. Qu’importe que cela dure ou non. Vous ne savez que trop que toute forme d’espoir relèverait de l’ignominie et de la trahison.





3

Bien sûr, c’est encore et toujours et encore ce même rêve qu’il ne peut oublier. Les rues frigides et cossues ont cédé la place à quelque bord de mer. Les palmiers feignent d’agiter mollement une palme indolente, la mer est pâle, clapotante, le ciel une masse menaçante. Et l’histoire est la même…
Alors, vous regardez autour de vous, tous ces bleus, ces verts, cette exubérance tapageuse de couleurs, ce tumulte végétal, et ce temps lent et défraîchi…
Une cloche ! Une cloche sonne... Vous pensez fugitivement à l’enfant que vous avez été et là, vous l’enterrez, vivant, sous ses rêves d’azur, d’absolu, et ses petites mains se tendent. Loin, très loin, tintent des billes dans un sac, sous l’œil d’un loup au poil râpé. Un goût de bile vous submerge. Dans l’air, flotte un parfum, celui-là même d’un être cher. Vous pleurez.
Tout est nuit désormais, tout semble avoir basculé... Vous marchez, vous errez, allant d’un pas mécanique, emporté et poussé par ce poids et ce vent qui...
Vous ne savez que trop que toute forme d’espoir relèverait de l’ignominie et de la trahison.


3’
Bien sûr, ce sera encore et toujours le même rêve. Vous ne pourrez l’oublier. Les rues frigides et cossues auront cédé la place à quelque insularité tropicale. Les palmiers feindront d’agiter mollement une palme indolente, la mer sera pâle, clapotante, le ciel une masse menaçante. Et l’histoire, la même…
Alors, vous regarderez autour de vous, tous ces bleus, ces verts, cette exubérance tapageuse de couleurs, ce tumulte végétal, et ce temps lent et défraîchi…
Une cloche ! Une cloche sonnera... Vous penserez à l’enfant que vous avez été et vous l’enterrerez, vivant, sous ses rêves d’azur, d’absolu, et lorsque ses petites mains se tendront- Non !
Loin, très loin, tinteront des billes dans un sac en toile rouge sous l’œil d’un vague animal en peluche au poil râpé. Un goût de bile vous submergera. Dans l’air, flottera un parfum, celui-là même d’un être cher. Vous pleurerez.
Le jour sera tombé. Tout sera nuit désormais, monochrome, tout semblera avoir basculé... Vous marcherez encore, blême, vous errerez, mais d’un pas mécanique, vous irez, emporté par ce poids et poussé par ce vent qui... Qu’importe que cela dure ou non. Vous ne saurez que trop que toute forme d’espoir relèverait de l’ignominie et de la trahison.



4
C’est le rêve, encore. Le même. Tu ne peux l’oublier. Les rues, presque lisibles en filigrane, se sont effacées devant quelque bord de mer, celle-ci clapote, pâle, inodore. Un vent chaud agite quelques palmes indolentes. Le ciel est ce couvercle...
Et l’histoire est la même…
Alors, sans pouvoir ranimer la stupéfaction qui devrait être tienne, tu regardes autour de toi, ces bleus, ces verts, cette luxuriance éhontée, cette exubérance tapageuse de couleurs, ce tumulte végétal- et ce temps lent et défraîchi…
Une cloche ! Une cloche sonne... Tu penses à l’enfant que tu fus et là, tu l’enterres, vivant, sous ses rêves d’azur, d’absolu, et ses petites mains se tendent- Non ! Non ! Oh ! Comme tu voudrais échapper à ton tour à ton rêve !
Des billes, loin, très loin, tintent dans une bourse en cuir sale, sous l’œil d’un mouton à la laine rare. Un goût de bile te submerge. Dans l’air, entremêlé à l’arome entêtant du tiaré, flotte un parfum, celui-là même d’un être cher. Tu pleures.
Mais le jour est tombé. Tout est nuit désormais, monochrome, tout semble avoir basculé... Tu marches, blême, emporté par le fardeau d’hier et poussé par ce vent qui...
Qu’importe que cela dure ou non. Tu sais que toute forme d’espoir relèverait de l’ignominie et de la trahison.


5


En a

C’est une rue déserte bordée d’immeubles cossus. Tout est terne, monochrome, entre l’être et l’inexistence. Les semelles, sur le bitume, sourdes et feutrées, résonnent.
Un homme, qu’on voit de dos, chemine.
Vous percevez le sens de cette histoire. Y rôde quelque chose de terrible, qu’on ne peut ni éluder, ni éliminer. Le décès de son fils. Le viol et le suicide de son épouse. Peut-être moins, ou plus, une incompréhension, une perte du fil, une perception de déchirure.
Fuir est illusoire. Ses mouvements sont l’horloge de son destin. Il n’ignore rien. Il pressent. Proche est le dénouement. Peut-être même l’espère-t-il, pour en finir, enfin, ne plus supporter ce poids, ces membres en coton, cette oppression, cette gorge sèche, ce vide, ce vide !

Oui. En finir. Que des cris déchirent les décors, qu’il sente que le monde résiste- et vit, horriblement.
Peu à peu, il s’éloigne. Son costume gris épouse le gris du rêve. Le son de ses semelles décroît.
Vous inquiètent tout d’un coup, tous ces bleus, ces verts, ces couleurs excessives, ces gens qui vont et viennent. Tout ceci vous semble si futile et si creux.
Une cloche sonne. Remontent des souvenirs de vos tout premiers temps. Vos rêves éteints.
Tintent les billes sous l’œil d’un nounours élimé, un goût de bile vous submerge. Flotte une odeur, celle d’un être cher, père ? mère ?... Vous pleurez.
Le jour est tombé. Les lumières sont éteintes. Tout est gris, terne, monochrome, et douteux. Vous errez, riche de ce tourment : toute forme d’espoir relève de l’ignominie.

**

en e

Un parc au bord d’un lac, à la nuit. Partout du blanc, du blanc ou du gris. Tout paraît inconsistant. Il va, son pas sonnant.
Il va, sans bruit, sans agitation.
Nous savons. Nous n’osons. Mais nous savons, vous aussi… Là ! Pas loin, sa fin ? La fin ? Un noir vil, un noir bas,- la mort ? Pis. Oh ! Pis !
Nul point où fuir. Alors, il va.
Il sait la fin, là.
Il voudrait dormir. Il voudrait mourir. Finir.
Il voudrait fuir, là-bas fuir…
Il va, tout droit.

Son pas soudain lointain.
Il va, gris sur gris, son habit gris banal sur fond du gris souris du lac.
S’il avait raison ?
Si… ?
Il a raison ! Il va.

Mais vous ? Sons, chants, mots tout autour. Mots faux. Sons, chants, itou.
Un son pourtant… Un bourdon !...
Mais avant, un gamin aimant l’azur, l’absolu… Aujourd’hui ? Aujourd’hui quoi ?
Un son, un son surgi d’un sac : tintant, billous, billous … Oh ! Nounours ! Nounours au poil ras, au poil gras, Nounours mon amour mort…
Dans l’air, un parfum… Papa ? Maman ? Ma chérie ?
Chut ! Chagrin. Chagrin trop fort, trop lourd, pour nos mots.


La nuit. Gris triomphant.
Vous. Toi. Tu vas. Tu sais qu’il n’y a pas d’autre choix, sinon la trahison.
Alors, tu vas.




**



Un long cours nu sans son tas d’habitants cossus.
Tout parait pâli, blanc ou gris, Nos pas, pourtant…
Lui, on voit son dos, il va d’un pas constant.

Nous savons qu’il gît là – quoi ? Un savoir. La mort. Pis.
Partir ? Illusion ! Il va. Son pas sait aussi.
Un poids dans son corps. La soif.
Oui, Finir ! cris hachant tout.

**

Peu à peu, il s’éloigne. Son habit gris se fond dans le gris de l’avenue. Mais le bruit de son pas ne décroît qu’à peine. Et vous savez, oui, vous savez maintenant que la réalité lui appartient- à lui.
Alors, vous regardez autour de vous, ces bleus, ces verts, cette exubérance tapageuse de couleurs, ces gens qui vont et viennent, qui vous dévisagent ou vous ignorent. Tout cela vous paraît désormais si fragile et si faux.
Une cloche sonne. Vous pensez à l’enfant que vous avez été. À ses rêves d’azur, d’absolu. Tandis que tintent les billes dans un sac sous l’œil d’un nounours au poil râpé, un goût de bile vous submerge. Dans l’air, flotte un parfum, celui-là même d’un être cher, père ? mère ? grand-mère ? Vous pleurez.
Le jour est tombé. Les lumières sont éteintes. Tout est gris désormais, pâle, monochrome, à la lisière du vrai. Vous marchez. Qu’importe que cela dure ou non. Vous savez que toute forme d’espoir relève de l’ignominie et de la trahison.




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Message par Lix 11.11.24 8:52

vous m'avez donné le tournis avec ces deux dernières publications
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Message par Lix 11.11.24 11:07

relus, belle performance
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Message par Phil BOTTLE 11.11.24 11:31

Deux sortes? Mais non...
"Il y a trois sortes d'hommes : les Vivants, les Morts, et ceux qui vont sur la Mer".

Aristote (d'après Anacharsis)

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Message par pehache 11.11.24 13:27

Merci.
Le lipogramme, vers la fin, est à la limite de l'abscons, mais, bon, avec ce qui le précède... on bouche les trous.


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Message par Lix 13.11.24 6:03

Relu celui en e. Pas simple à faire. Pas compris "billous". (Quand même deux e qui se sont glissés "chérie" et "autre")
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