Portraits et tableaux
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Portraits et tableaux
Comme l'indique le titre, c'est un ensemble de textes poétiques écrits au fil des ans, sans liens directs entre eux, à lire chacun pour ce qu'il est, comme on s'arrête dans une galerie.
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Re: Portraits et tableaux
Portraits et tableaux
1
devant le Burger King
ils sont là tous les deux au sortir du parking
où je m’étais garé pour attendre ma fille.
Ils sont vieux. Décoiffée, elle a les yeux qui brillent,
elle s’agite, crie, devant le Burger King.
Dans sa main droite un sac, dans l’autre sa moitié.
Il tire. Elle se tend. Il n’en peut plus. Attend.
En moulinant des bras, elle lance son pied…
Les passants trop pressés contournent l’incident.
Le voyant épuisé, je lui offre mon aide.
Il me dit « oui », confie « qu’elle perd ses repères »,
je lui souffle en retour : maman aussi… ma mère…
Main dans la main, on avance, elle tendue, raide.
Parvenus à leur porte, il me fixe longtemps
et puis me remercie. Baissant les yeux, je fuis
en ravalant mes pleurs sous le néon qui luit.
Alors ma fille arrive, hirondelle et printemps.
2
Où vais-je ?
Un homme court le long d’une falaise.
Un homme assis le regarde passer- puis lui crie :
où vais-je ?
Le premier stoppe net. S’interroge à son tour.
Où vais-je ?
Je le savais et je ne le sais plus.
Il s’assied. Et l’autre se lève.
Un homme court le long d’une falaise.
3
Le trompettiste de Brême
Je suis ce Nègre bleu dérobé dès l’enfance
aux moiteurs africaines
arraché avili dans le roulis l’odeur
de la merde et des peines
Je suis ce chant tissé de mémoire et souffrances
palpitant dans vos veines
Je suis ce cri qui monte ainsi qu’une trompette
écho aigu des chaînes
Je suis injure à l’homme aux cieux aux dieux Tempête
infinie souveraine
aux pieds de vos buildings mon cri cette fureur
vous étrangle et vous mène
Je suis l’enfant maudit du flûtiste de Brême
1
devant le Burger King
ils sont là tous les deux au sortir du parking
où je m’étais garé pour attendre ma fille.
Ils sont vieux. Décoiffée, elle a les yeux qui brillent,
elle s’agite, crie, devant le Burger King.
Dans sa main droite un sac, dans l’autre sa moitié.
Il tire. Elle se tend. Il n’en peut plus. Attend.
En moulinant des bras, elle lance son pied…
Les passants trop pressés contournent l’incident.
Le voyant épuisé, je lui offre mon aide.
Il me dit « oui », confie « qu’elle perd ses repères »,
je lui souffle en retour : maman aussi… ma mère…
Main dans la main, on avance, elle tendue, raide.
Parvenus à leur porte, il me fixe longtemps
et puis me remercie. Baissant les yeux, je fuis
en ravalant mes pleurs sous le néon qui luit.
Alors ma fille arrive, hirondelle et printemps.
2
Où vais-je ?
Un homme court le long d’une falaise.
Un homme assis le regarde passer- puis lui crie :
où vais-je ?
Le premier stoppe net. S’interroge à son tour.
Où vais-je ?
Je le savais et je ne le sais plus.
Il s’assied. Et l’autre se lève.
Un homme court le long d’une falaise.
3
Le trompettiste de Brême
Je suis ce Nègre bleu dérobé dès l’enfance
aux moiteurs africaines
arraché avili dans le roulis l’odeur
de la merde et des peines
Je suis ce chant tissé de mémoire et souffrances
palpitant dans vos veines
Je suis ce cri qui monte ainsi qu’une trompette
écho aigu des chaînes
Je suis injure à l’homme aux cieux aux dieux Tempête
infinie souveraine
aux pieds de vos buildings mon cri cette fureur
vous étrangle et vous mène
Je suis l’enfant maudit du flûtiste de Brême
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix, Phil BOTTLE et Ray dit Kourgarou aiment ce message
Re: Portraits et tableaux
Y'a comme un malaise le long de cette falaise ! perturbant.
Le premier est poignant.
Le troisième, me manque sans doute des références pour comprendre
Le premier est poignant.
Le troisième, me manque sans doute des références pour comprendre
Lix- Messages : 828
Date d'inscription : 05/08/2024
Re: Portraits et tableaux
Ignorant de ce que j'ignore, je ne peux répondre.
ça, peut-être: En 1959, Rollins se sent frustré par ce qu'il perçoit comme ses propres limites musicales et prend la première - et sa plus célèbre - pause sabbatique musicale. Deux ans de doute, pris par la tempête du free-jazz, en manque de nouveaux terrains à défricher. Un voyage en Inde et des heures à jouer, seul, sous le pont Williamsburg à New York. À son retour sur la scène jazz en 1962, il signe un contrat avec RCA Records et nomme son nouvel album The Bridge qui constitue un tournant.
ou: je joueur et flûte mélangé aux musiciens de Brême ?
ou un narrateur Noir descendant de la traite négrière et gorgé de la violence urbaine ?
Merci pour les lectures, le deuxième, zarbi, fait partie du lot de mes tout premiers que je n'ai pas jetés.
ça, peut-être: En 1959, Rollins se sent frustré par ce qu'il perçoit comme ses propres limites musicales et prend la première - et sa plus célèbre - pause sabbatique musicale. Deux ans de doute, pris par la tempête du free-jazz, en manque de nouveaux terrains à défricher. Un voyage en Inde et des heures à jouer, seul, sous le pont Williamsburg à New York. À son retour sur la scène jazz en 1962, il signe un contrat avec RCA Records et nomme son nouvel album The Bridge qui constitue un tournant.
ou: je joueur et flûte mélangé aux musiciens de Brême ?
ou un narrateur Noir descendant de la traite négrière et gorgé de la violence urbaine ?
Merci pour les lectures, le deuxième, zarbi, fait partie du lot de mes tout premiers que je n'ai pas jetés.
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix aime ce message
Re: Portraits et tableaux
Les écrits des poètes ne se discutent pas. Ils se ressentent, ou pas.. Chaque poème porte en lui l'instant, que le temps a dilué. De toutes façons, il y a tant de temps entre la fulgurance d'un écrit et sa lecture par autrui..
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
Re: Portraits et tableaux
4
Tombeau des antipodes
Bascule le navire aspiré par l’ailleurs.
Les terres ne sont plus qu’émanations des songes.
Les nuages parfois, grattant ce qui nous ronge,
esquissent des châteaux, des montagnes, des leurres.
Les étoiles ne sont plus même nos étoiles.
Il arrive qu’on voit quelque bête marine,
échappée, arrachée aux parois utérines
par ces vents capricieux qui déchirent nos voiles.
Des compagnons sont morts. Une plaie, la gangrène,
et tous les maux de mer. Certains disent blasphème,
mauvais sort, œuvre impie, réclament le baptême.
On s’espionne, on s’épie, on affûte sa haine.
Mais dès qu’on l’aperçut, cet archipel touffu,
le vif éclat des verts, l’eau douce des cascades,
ses palmiers indolents… Chez tous les camarades,
la vaillance reprit, joyeuse, le dessus.
Les sauvages nous ont fraîchement accueillis.
Grondement des tam-tams, visages peints de blanc,
coups de rame en cadence, arrivant sur nos flancs !
Qu’ils étaient noirs et laids !... L’air vibrait de leurs cris.
Des pirogues, ces chiens visaient, lançaient, tiraient
javelots et cailloux, une flèche parmi
s’enfonça devant moi dans l’œil de mon ami,
sous les ricanements de tous ces contrefaits.
Nos canons mis en branle et nos mousquets chargés,
au sabre le travail, vite parachevé :
les Cafres massacrés, ce fut un franc succès.
Nous étions maculés de sang chaud et fierté.
Le village était vide. On longea le rivage,
éventrant les esquifs laissés en bord de mer.
En trois groupes, d’abord, on ratissa du fer
la jungle environnante, au cœur, pleins de carnage.
Les filles partagées sentaient le feu de bois.
Leur faible résistance exprimait à nos yeux
la supériorité de nos lois, de nos dieux.
Des enfants, je ne sais, ce qu’il advint ma foi.
Au milieu de la nuit, alerté par des pleurs,
je trouvai la coupable, accroupie, solitaire,
lui appris sur-le-champ bonne raison de braire.
Le lendemain matin, envolée l’âme sœur !
Il y eut quelques jours à profiter ainsi
des charmes de Cythère et d’un ciel toujours bleu.
Un peu de cabotage… une escapade ou deux…
Le chemin du retour s’effectua sans soucis.
***
Tombeau des antipodes
Bascule le navire aspiré par l’ailleurs.
Les terres ne sont plus qu’émanations des songes.
Les nuages parfois, grattant ce qui nous ronge,
esquissent des châteaux, des montagnes, des leurres.
Les étoiles ne sont plus même nos étoiles.
Il arrive qu’on voit quelque bête marine,
échappée, arrachée aux parois utérines
par ces vents capricieux qui déchirent nos voiles.
Des compagnons sont morts. Une plaie, la gangrène,
et tous les maux de mer. Certains disent blasphème,
mauvais sort, œuvre impie, réclament le baptême.
On s’espionne, on s’épie, on affûte sa haine.
Mais dès qu’on l’aperçut, cet archipel touffu,
le vif éclat des verts, l’eau douce des cascades,
ses palmiers indolents… Chez tous les camarades,
la vaillance reprit, joyeuse, le dessus.
Les sauvages nous ont fraîchement accueillis.
Grondement des tam-tams, visages peints de blanc,
coups de rame en cadence, arrivant sur nos flancs !
Qu’ils étaient noirs et laids !... L’air vibrait de leurs cris.
Des pirogues, ces chiens visaient, lançaient, tiraient
javelots et cailloux, une flèche parmi
s’enfonça devant moi dans l’œil de mon ami,
sous les ricanements de tous ces contrefaits.
Nos canons mis en branle et nos mousquets chargés,
au sabre le travail, vite parachevé :
les Cafres massacrés, ce fut un franc succès.
Nous étions maculés de sang chaud et fierté.
Le village était vide. On longea le rivage,
éventrant les esquifs laissés en bord de mer.
En trois groupes, d’abord, on ratissa du fer
la jungle environnante, au cœur, pleins de carnage.
Les filles partagées sentaient le feu de bois.
Leur faible résistance exprimait à nos yeux
la supériorité de nos lois, de nos dieux.
Des enfants, je ne sais, ce qu’il advint ma foi.
Au milieu de la nuit, alerté par des pleurs,
je trouvai la coupable, accroupie, solitaire,
lui appris sur-le-champ bonne raison de braire.
Le lendemain matin, envolée l’âme sœur !
Il y eut quelques jours à profiter ainsi
des charmes de Cythère et d’un ciel toujours bleu.
Un peu de cabotage… une escapade ou deux…
Le chemin du retour s’effectua sans soucis.
***
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix, Phil BOTTLE et Titi aiment ce message
Re: Portraits et tableaux
Entre Verlaine, Baudelaire, Poe, et Conrad. Merci Péhache pour la relation de ce débarquement d'un autre temp et en d'autre lieu... .
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
Re: Portraits et tableaux
Ne se trompe qui veut. Eustache VS Fallope,
Et il est de bon ton de détruire tous nos rêves.
Triste époque où tout est bon pour la décharge...
Pourtant, sans rien nier ni renier... .
"Ce n'est pas sur mes 20 ans que je pleure
Bien souvent avec les filles j'ai pleuré
Mais on aurait pu laisser
Nos chansons dormir en paix
Nos chansons et nos amours, nos amours" (la maison sur le port)
Et il est de bon ton de détruire tous nos rêves.
Triste époque où tout est bon pour la décharge...
Pourtant, sans rien nier ni renier... .
"Ce n'est pas sur mes 20 ans que je pleure
Bien souvent avec les filles j'ai pleuré
Mais on aurait pu laisser
Nos chansons dormir en paix
Nos chansons et nos amours, nos amours" (la maison sur le port)
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
Ray dit Kourgarou aime ce message
Re: Portraits et tableaux
il donne froid dans le dos le 4.
Lix- Messages : 828
Date d'inscription : 05/08/2024
Phil BOTTLE aime ce message
Re: Portraits et tableaux
Merci, c'est le but.Lix a écrit:il donne froid dans le dos le 4.
On est souvent plus efficace pour dénoncer avec du cynisme qu'avec un panneau "c'est pas bien!".
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Re: Portraits et tableaux
5
l’orpailleur exilé
Le minéral est lourd et mes forces modestes.
Me faut-il en Espagne inventer des auberges
pour y poser ma bière, y exposer ma verge
à la vue, au toucher de servante aux mains lestes ?
Le minéral est sourd à mes larmes, je peste
accroupi dans la boue, vaseuse, de la berge ;
c’est tout pour aujourd’hui, je vais faire une sieste
et rêver, si Dieu veut, de servante aux mains lestes.
***
6
la Pythie ou le rêve d’Ulysse
sous le masque angélique
de la vierge Pythie
sous le voile diaphane où sa poitrine saille
sous l’ourlet duveteux où sa lèvre rosit
gît le mal absolu la béance qui bâille
la noise la rumeur le chaos des possibles
c’est le pus les humeurs les putrides entrailles
c’est le cul bien tendu vers la mort en ripaille
lorsque l’œil apparaît sous les cils en bataille
il est blanc l’œil vertigineux nourri d’absence
tout homme en lui s’oublie aiguille dans la paille
s’abandonne se perd vaincu sans connaissance
et la pute en furie tourne et tournoie et danse
autour du vain phallus du sacrifiant en transe
elle tourne elle danse et tournoie et défaille
roulent les osselets lancés comme mitraille
sur la piste souillée démoniaque sacrée
or tandis que du sang de son sexe s’évade
la Pythie révulsée la prophétie déclame
l’exilé qui frappait l’océan de ses rames
de son île jamais ne reverra la rade
et sans fin retentit le cri des Érinyes
La dame à sa fenêtre, tableau flamand
Tout être tend à persévérer dans son être,
cette vérité là prend force d’évidence
en l’homme. Ce roseau, pensant, quêteur de sens…
Ainsi songeait la femme blonde à sa fenêtre.
Tout être tend à persévérer dans son être,
et pourtant, foutre dieu ! la mort est ma potence.
Faut-il se dépouiller de la moindre espérance ?
Mais que fait cet éphèbe, ici, traînant ses guêtres ?
Tout être tend à persévérer dans son être,
L’éternité nous est promise- et, oui ! donnée !
Elle est le pur présent et présent à jamais.
A propos de présents, j’attends ceux de ce reître…
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix et Phil BOTTLE aiment ce message
Re: Portraits et tableaux
Les cris des Érinyes ont traversé ma nuit
Et la mort, affolé, s'est elle aussi enfui.
Mais elle est immortelle
S'est seul'ment absentée, pour laver la vaisselle
Seulement laver, celle qui est salle
N'en déplaise à la fille de salle
Qui aurait préféré laver Maria
De ses péchés en chantant "ça ira".
En attendant, que la servante aux mains leste
Prestement me déleste!
Et peste soit de la batave
Avec son yaourt betterave!
Et la mort, affolé, s'est elle aussi enfui.
Mais elle est immortelle
S'est seul'ment absentée, pour laver la vaisselle
Seulement laver, celle qui est salle
N'en déplaise à la fille de salle
Qui aurait préféré laver Maria
De ses péchés en chantant "ça ira".
En attendant, que la servante aux mains leste
Prestement me déleste!
Et peste soit de la batave
Avec son yaourt betterave!
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
Re: Portraits et tableaux
6 et 7 très beaux. mon préféré sur ce coup-là c'est le 5.
le 2, zarbi comme vous dites, ç'aurait été bien dommage de le jeter !
le 2, zarbi comme vous dites, ç'aurait été bien dommage de le jeter !
Lix- Messages : 828
Date d'inscription : 05/08/2024
Re: Portraits et tableaux
J'en ai sans doute jeté des bien meilleurs et je continue. On est mauvais juge de ses enfants, tous ses enfants.
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Re: Portraits et tableaux
8
Je me souviens de toi Mémère
Je me souviens de ces jours où
Nous restions seuls à ne rien faire
Le temps passait poreux et doux
Je me souviens de toi Mémère
Quand le journal sur tes genoux
Ne bougeait plus le temps d’un somme
Tu ronflais tu souriais comme
Un enfant de son mauvais coup
Je poussais mes petits cyclistes
De case en case sur le sol
J’avais deux pièces pour ma piste
Et parfois j’allais à l’école
Je me souviens de toi Margrite
Vêtue de deuil d’abord en noir
Puis en gris et mauve petite
Le souper tôt et puis bonsoir
Je me souviens des hôpitaux
Et des visites médicales
Tu manquais y laisser ta peau
Mais jamais tu n’as dit je cale
Toi qui étais restée gamine
Couvée entre père et mari
Cette santé toujours chagrine
N’avait pas tué ton ironie
Je m’en voudrai toute ma vie
D’avoir failli quand il fallait
Être avec toi près de ton lit
Le jour où tu nous as quittés
Souvent je t’ai imaginée
Mère improbable et jeune fleur
Tu m’as donné sans exiger
Rien en retour tant de bonheur
Je te cueillais des primevères
Te les portais vite en courant
Le temps bénit tous ces hiers
Où s’aimaient hiver et printemps
9
L’acteur
La soie de l’horizon m’enveloppe et me lange,
je m’allonge, je plonge entre ces doux rideaux
et plus rien ne me point et plus rien ne me mange :
j’embrasse l’infini, étendu sur le dos.
me parvient, vaguement, un écho, sourdement,
quelque clameur au loin, des applaudissements ?
le spectacle était bon, les spectateurs contents
saluent comme il se doit mon évanouissement.
Mais se condense l’air, s’éteignent les lumières,
il fait à peu près nuit et je peine à quitter
mon costume de scène, un chapelet d’hiers,
le souvenir diffus de ce qui a été.
Je m’éveille en sursaut, tout grelottant de fièvre,
Il me faut, par l’exploit, remplir cette existence
Si vaine et si futile : il faut lui donner sens !
Et la journée se passe et s’englue dans le mièvre…
Je me souviens de toi Mémère
Je me souviens de ces jours où
Nous restions seuls à ne rien faire
Le temps passait poreux et doux
Je me souviens de toi Mémère
Quand le journal sur tes genoux
Ne bougeait plus le temps d’un somme
Tu ronflais tu souriais comme
Un enfant de son mauvais coup
Je poussais mes petits cyclistes
De case en case sur le sol
J’avais deux pièces pour ma piste
Et parfois j’allais à l’école
Je me souviens de toi Margrite
Vêtue de deuil d’abord en noir
Puis en gris et mauve petite
Le souper tôt et puis bonsoir
Je me souviens des hôpitaux
Et des visites médicales
Tu manquais y laisser ta peau
Mais jamais tu n’as dit je cale
Toi qui étais restée gamine
Couvée entre père et mari
Cette santé toujours chagrine
N’avait pas tué ton ironie
Je m’en voudrai toute ma vie
D’avoir failli quand il fallait
Être avec toi près de ton lit
Le jour où tu nous as quittés
Souvent je t’ai imaginée
Mère improbable et jeune fleur
Tu m’as donné sans exiger
Rien en retour tant de bonheur
Je te cueillais des primevères
Te les portais vite en courant
Le temps bénit tous ces hiers
Où s’aimaient hiver et printemps
9
L’acteur
La soie de l’horizon m’enveloppe et me lange,
je m’allonge, je plonge entre ces doux rideaux
et plus rien ne me point et plus rien ne me mange :
j’embrasse l’infini, étendu sur le dos.
me parvient, vaguement, un écho, sourdement,
quelque clameur au loin, des applaudissements ?
le spectacle était bon, les spectateurs contents
saluent comme il se doit mon évanouissement.
Mais se condense l’air, s’éteignent les lumières,
il fait à peu près nuit et je peine à quitter
mon costume de scène, un chapelet d’hiers,
le souvenir diffus de ce qui a été.
Je m’éveille en sursaut, tout grelottant de fièvre,
Il me faut, par l’exploit, remplir cette existence
Si vaine et si futile : il faut lui donner sens !
Et la journée se passe et s’englue dans le mièvre…
Dernière édition par pehache le 30.10.24 20:03, édité 2 fois
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix et Phil BOTTLE aiment ce message
Re: Portraits et tableaux
Mémère ! Ah ! Mémère ! Quelle tendresse ! Et l'absence quand il ne fallait pas, combien de nous l'ont connue ! Le vie est aussi belle que cruelle;
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
Re: Portraits et tableaux
Ah ben non, jetez pas ! Si vous voulez, l'admin' vous fait une rubrique "rebut" ou autre nom que vous voudrez :-)
Lix- Messages : 828
Date d'inscription : 05/08/2024
Re: Portraits et tableaux
Le pb, c'est que ce sont aux neuf dixièmes des manuscrits. Parfois ayant subi des intempéries. Et, surtout, je suis illisible. Je veux dire que, si j'écris vite, c'est souvent le cas, je peine à me relire. Alors, sur du récent, je devine. Mais de l'ancien...)Lix a écrit:Ah ben non, jetez pas ! Si vous voulez, l'admin' vous fait une rubrique "rebut" ou autre nom que vous voudrez :-)
Merci pour les encouragements.
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Re: Portraits et tableaux
Je viens de corriger le 9, un vers un peu long (le spectacle était bon// pièce bonne).
10
fétiches
amulettes de bois aux formes s’effaçant
gris-gris d’ambre ou d’onyx d’os ou d’ivoire
tachés de larmes de sperme de sang
fétiches endormis sous des draps dans l’armoire
Pauvres choses flétries désormais sans pouvoir
sur l’amour ni la chasse ni la pluie
vous attendez patientes dans le noir
insensibles à la peur à l’oubli à l’ennui
11
métempsychose
Je suis le roi maudit de steppes irradiées
le bouffon philosophe aux paroles de pierres
l’empereur albinos de jungles oubliées
un vieux chien solitaire abaissant ses paupières
rêvant à d’autres lieux d’autres liens d’autres niches
où resuçant encor fabuleux le même os
je suis la vie sans foi qui s’étiole s’écrase
je suis l’angoisse vaine abrutissant la biche
je ne suis rien du tout je n’ai pas d’adjectif
je vais de songe en songe ainsi qu’un éphémère
cherchant indolemment l’aspiration du vif
10
fétiches
amulettes de bois aux formes s’effaçant
gris-gris d’ambre ou d’onyx d’os ou d’ivoire
tachés de larmes de sperme de sang
fétiches endormis sous des draps dans l’armoire
Pauvres choses flétries désormais sans pouvoir
sur l’amour ni la chasse ni la pluie
vous attendez patientes dans le noir
insensibles à la peur à l’oubli à l’ennui
11
métempsychose
Je suis le roi maudit de steppes irradiées
le bouffon philosophe aux paroles de pierres
l’empereur albinos de jungles oubliées
un vieux chien solitaire abaissant ses paupières
rêvant à d’autres lieux d’autres liens d’autres niches
où resuçant encor fabuleux le même os
je suis la vie sans foi qui s’étiole s’écrase
je suis l’angoisse vaine abrutissant la biche
je ne suis rien du tout je n’ai pas d’adjectif
je vais de songe en songe ainsi qu’un éphémère
cherchant indolemment l’aspiration du vif
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix et Phil BOTTLE aiment ce message
Re: Portraits et tableaux
Ce métempsychose est envoûtant. Vrai
Mets m'en six choses... (ça, c'est pour le fun) car je suis l'ombre du bouffon...
Mets m'en six choses... (ça, c'est pour le fun) car je suis l'ombre du bouffon...
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
pehache aime ce message
Re: Portraits et tableaux
10 et 11, au lecteur de poser les blanches et sa ponctuation. j'aime ces deux nouveaux portraits/tableaux
Lix- Messages : 828
Date d'inscription : 05/08/2024
Phil BOTTLE aime ce message
Re: Portraits et tableaux
12
je reviendrai
Je suis au bord du Gange un lépreux un paria
que le rapace observe et son œil vert opale
soudainement se voile ainsi que la Maya
abolissant le temps les esprits le Bengale
tous mes haillons d’enfance
Épuisé par la marche
je m’écroule indolent au pied du Taj Mahal
sans m’être purifié dans l’eau bénie et sale
et je sais que jamais je ne franchirai l’arche
je reviendrai mendiant ou scorpion ou mygale
13
Bonheur bourgeois
Je n’ai jamais franchi la lisière des ports
hauturière la houle est toujours un mystère
mais j’aime regarder rugir au loin la mer
les deux pieds bien au sec et réjoui de mon sort
pehache- Messages : 207
Date d'inscription : 10/08/2024
Lix et Phil BOTTLE aiment ce message
Re: Portraits et tableaux
Il n'est pas toujours doux d'être un hindou à part, Paris y a de tout (à part, paria de tout )
Pôvre petit bourgeois qui jamais ne connaîtra la mer... Il mourra le cœur au sec, mais ne saura pas le bonheur cap-hornier de pisser contre le vent.
Pôvre petit bourgeois qui jamais ne connaîtra la mer... Il mourra le cœur au sec, mais ne saura pas le bonheur cap-hornier de pisser contre le vent.
Phil BOTTLE- Messages : 301
Date d'inscription : 06/08/2024
Age : 69
Localisation : Au pays des vents
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